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mercredi 2 mai 2001

Les cookies (leur vie, leurs moeurs)

Version « ils sont partout »
par Lefayot
 

Bon, maintenant que je vous ai expliqué pourquoi il ne faut pas se méfier des cookies, il va me falloir vous raconter comment effectivement on peut vous fliquer avec. Enfin quand je dis fliquer, il s’agit d’un abus sémantique, dont sont familiers les professionnels de la dénonciation des vrais maîtres du monde.

Disons que les cookies peuvent effectivement servir à faire du traçage, et, ce, sans que l’utilisateur s’en doute. Le tout est de savoir exactement ce que signifie s’en doute

(Ce qui suit est un raisonnement en partie hypothétique. Il explicite des possibilités technologiques, pas forcement des faits)

Vous avez sans doute remarqué ces délicieuses bannières de pub qui ornent bon nombre de sites ? Imaginons maintenant que vous cliquiez, par lassitude, sur la bannière d’un fabricant de trampolines à grenouilles. Avant que vous n’alliez sur le site marchand, vous allez passer par la centrale de pub, c’est à dire le serveur qui affiche les bannières.

Et que va-t’elle faire la coquine ? Elle va vous balancer un cookie.

A quoi cela peut-il bien servir ? Eh bien voilà : le cookie qui vous a été renvoyé contient comme information le fait que vous avez cliqué sur le lien du marchand de trampolines à grenouilles. Aussi, la centrale de pub va savoir ce qui vous intéresse (les trampolines et les grenouilles), et va donc vous envoyer, les prochaines fois, des pubs plus ciblées (par exemple une pub pour les rôtissoires à grenouilles ou pour le club des échangistes sur trampoline).

Evidemment plus vous avez cliqué sur des bannières de pub, plus le ciblage va entre précis, et plus les informations contenues dans le cookie vont être pertinentes.

L’idée sous jacente là-dessous, c’est que plus on propose au client ce dont il a envie, plus il consommera.

Et ce n’est pas pure affabulation de ma part : des produits du marché destinés à developper les sites web marchands, comme BroadVision sont entièrement construits sur ce concept marketing (ça s’appelle le One-To-One, dans leur cas). Avec des systèmes d’analyse marketing derrière, le but est de rétroactivement adapter le site en fonction de ce que l’on est susceptible de vendre à l’internaute. Ca se traduit essentiellement par des pubs sur la page d’accueil adaptées aux besoins de l’internaute, des liens vers d’autres marchands associés, des short-cuts vers l’article du mois (qui convient au sujet), etc ….

Toutefois dans cette optique, le cookie n’est qu’un outil, qui ne peut contenir que les infos que vous avez données sur le net. En cliquant sur une bannière de pub, sans savoir vraiment à quoi vous vous exposiez, vous entrez dans un système où le but du jeu est de cracher au bassinet, ce que vous savez pertinemment. De surcroît, le fait que ce fameux cookie ne serve qu’à mieux cibler les pubs ne change pas grand chose à l’affaire :

  • Ou vous vous en tapez des pubs, et vous ne remarquerez même pas le ciblage.
  • Ou vous êtes intéressé par le fait de consommer, et ça ne peut que vous avantager.

Le seul fait véritablement douteux dans toute cette affaire, c’est que cette pratique reste dissimulée, alors qu’elle ne gênerait à mon avis que très peu de monde si elle était révélée (à part quelques sectes de paranoïaques professionnels).

Pour conclure, je dirais qu’il est possible que des hackers fous de la mort qui tue soient capables d’utiliser les cookies et les failles de sécurité de certains navigateurs pour faire des trucs innommables sous la lune gibbeuse, mais personnellement je ne vois pas. A priori, un cookie ne fait que contenir des informations, soit des informations que l’on a explicitement données (son nom, son adresse, …), soit des informations implicites (comme les pages que l’on a pu visiter sur le site auquel le cookie est associé [1])[2]. Tout cela ne me semble pas faire peser de grandes menaces sur la paix du monde.

Sur ce, je vais me coucher …


Notes

- [1] Un truc que j’avais oublié de préciser : un cookie est associé à un site, et à un seul, théoriquement (plus exactement à un nom de domaine).

- [2]En pratique, le cookie contient seulement une référence vers des données qui sont stockées, elles, sur le site.
 
 
Lefayot
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tueur en scierie

20 février 2002
18 décembre 2001
 
SPIP
Web indépendant


> Les cookies (leur vie, leurs moeurs)
24 octobre 2001, message de riri
 

comment fait-on pour effacer les cookies de mon HD sous windows ME, merci

Répondre


PLUS SUR BIG BROS
2 mai 2001, message de TARTAR
 

Téléphonez
je sais où vous êtes

payez par carte bleue
je sais où vous êtes

je sais à qui et quand
je sais quoi et combien

que vous soyez délinquant ou non
je vous connais déjà

Trop tard !!
Au secours

Lire : Un bonheur insoutenable
d’un nommé Irving je crois
bouquin recommandé par un certain MITTERRAND un soir de duel avec SEGUIN .

Répondre
> PLUS SUR BIG BROS, 13 décembre 2001

Bonsoir, le bouquin auquel vous faites référence a été écrit par Ira Levin et on le trouve en collection J’ai Lu n°434.

Amicalement

Jérôme Marchand

Répondre


> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS)
2 mai 2001, message de Yann Schwartz
 

Bon, je vais pas refaire la tartine assénée dans ma réponse à la première partie de cet article.
Koikilensoi, cet article semble passer un peu vite sur l’idée qu’on peut très bien se débrouiller pour que dans les faits les cookies ne soient pas liés à un seul serveur. On peut donc agréger des informations sur une personne à partir d’une régie centrale.
C’est désagréable, mais on peut relativiser en se disant que les bases marketing "briques et ciment" - classiques, quoi - sont autrement plus précises et violeuses de vies privées que les bricolages faits à partir de cookies, mais bon.

Répondre
> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS), lefayot, 2 mai 2001

Oui, d’accord, c’est vrai ...

Mais : ainsi que c’est expliqué dans l’article, le cookie dans le cas d’un ciblage marketing ne contient qu’une reference sur la base qui contient les gouts et les couleurs (supposées) de l’utilisateur. Dans ces conditions l’utilisation d’un cookie par un autre site ne presente qu’un interet limité (voire nul) A MOINS que le premier site n’accepte de fournir/vendre ces données, ce qui en tout etat de cause est bien plus grave, et totalement transparent pour l’utilisateur.

Effectivement, la regie centrale peut eventuellement poser un probleme, mais il est de toute façon plus rentable pour un mechant d’acheter le digest marketing deja effectué par un site (de comerce par exemple).

La morale de l’histoire est : oui, on peut se faire peur avec les cookies, ok, mais c’est marginal (comme activité pour les dits cookies), et les echanges de fichiers sont autrement plus dangereux pour la vie privée.

Une des vraies question demeure : pourquoi aimer se faire peur ?

Répondre
> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS), 2 mai 2001

Pourquoi aimer se faire peur ?
Le se recouvre deux catégories de personnes :

Ceux qui ne connaissent pas la technique et lisent la presse qui a de bonne raison d’aimer faire peur - ça fait vendre, de donner à ses lecteurs l’impression d’être averti des dangers du monde contemporain.

Pour ceux qui connaissent la techniques et programmes des cookies, je pense qu’on peut avoir peur non pas en envisageant des conséquences précises énnonçables, mais plutôt à cause d’un sentiment diffus qui allie le vertige de la rapidité des développement technique et de l’inventivité sur internet, et la conscience des formes parfois subtiles de malheur que le développement du marketing peu répendre ; dans une humanité qui bénéficie pourtant de progrés techniques et scientifiques suceptibles de régler bien des problèmes traditionnellement posés aux sociétés humaines.

Répondre


> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS)
2 mai 2001
 

M Lefayot,
Le thème de vos articles est "démystifions les cookies". Votre préoccupation : déjouer les rumeurs paranoiaques en expliquant, par une brillante vulgarisation, leur mode de fonctionnement et leur utilité. Votre démarche tient de la réaction d’un connaisseur de la programmation aux peurs irrationnelles véhiculées par les médias (virus, cookies) souvent en quête de sensationnalisme.

Cependant, en ciblant ce problème, vous tirez si j’ose dire sur l’arbre qui cache la forêt. L’alternative que vous énnoncez au centre de votre texte me fait bondir :

" Ou vous vous en tapez des pubs, et vous ne remarquerez même pas le ciblage.

Ou vous êtes intéressé par le fait de consommer, et ça ne peut que vous avantager. "

Ne pensez vous pas qu’un des problèmes majeurs de l’état d’esprit occidental contemporain, une des causes première de nos malaises, se trouve justement dans la constitution d’une science de la manipulation de plus en plus fine et subtile qu’on appelle marketing ?

Le net en général, et les cookies comme outil particulier du net, participe à la création de bases de données comportementales de plus en plus fines, de plus en plus étendues. Les pros du marketing sauront de mieux en mieux nous canaliser, nous manipuler, réagir rapidement aux changement de l’opinion, de la mode, des moeurs ou des idées.

Ils sauront de mieux en mieux être les créateurs des référentiels partagés par tous dans la société, fondateurs de nos valeurs et modèles intégrés inconsciemment, à notre corps défendant.

Et quand on regarde ce que la publicité a pu causer comme dégats en termes de génération d’un monde désagréable à vivre (plus de jalousie du voisin, plus de ras le bol déclenché du boulot en nous affichant des palmiers, plus de "il a la voiture il aura la femme", plus de niveau de la presse à 0 pour cause d’audience maximale...etc etc etc..), il me semble qu’on ne peut éviter de nourrir une apréhension en voyant la puissance des outils dont sont en train de se doter les services de recherche marketing, grace à internet.

Qu’on ne me dise pas l’homme est libre, il n’est pas un mouton. Qui a fait un peu de marketing ou lu un peu de sociologie sait que sa nature est double : libre et conditionné à la fois.

Alors, je me fou qu’un lamer boutonneux sache que j’aime pamela anderson et la broderie, que j’habite à trifouilli, et que ma mère s’appelle Camille. Par contre, quand c’est World Compagnie Inc... Je suis inquiet. Pas tant pour moi. Plutot pour la possibilité d’etre heureux dans la société qu’on nous prépare.

Répondre
Suite .., Girafe, 2 mai 2001

PS : a force d’entendre parler de Big Brother, j’ ai lu récemment 1984. Si (particulièrement en ces temps de loftstory) la majorité des lecteurs en retiennent l’horreur de la surveillance totale et permanente, pour ma part c’est un autre élément de la description du totalitarisme qui m’a marqué : le fait de parvenir à manipuler les humains en mobilisant des techniques de conditionnement comportementale.

Les manipuler pour une domination où ils acceptent leur société et leur sort comme le moins mauvais possible. Une domination où le malaise ressenti par les individus est imputé aux dysfonctionnements de leur propre personne (cette technique s’emboite bien avec notre culpabilité judéo chrétienne héréditaire !). Sur ce point du moins, les inquiétudes contemporaines de Bourdieu rejoignent celles d’Orwell.

De nos jour, quand on va mal, on ne fait pas référence à Marx et au fait de se trouver la proie de forces sociales qui nous dépassent. On va voir un psy et on invoque sa petite enfance.

L’affinement des techniques publicitaires et les avancées des sciences de la manipulation m’effraient, car ils nous promettent une progression des formes modernes de totalitarisme publicitaires. Le livre 99 f a un style que l’on peut discuter, peut etre n’est il pas original, mais il constitue au moins aujourd’hui une référence largement partagée qui invoque ce problème.

Répondre
> Suite .., 3 mai 2001

D’accord.

On se saurait trop, dans ce cadre et pour une bonne introduction aux problèmes évoqués ici, recommander la lecture d’un petit ouvrage de 1987, aux Presses Universitaires de Grenoble :

R.-V. Joule et J.-L. Beauvois : Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens.

Répondre
> Suite .., 3 mai 2001

Oui,
si vous lisez ce livre, vous découvrirez avec délice les exemples des auteurs : l’application de la technique du pied dans la porte à l’extorsion d’un prêt de deux cheveaux pour week end à grande tante est hilarante !

Girafe

Répondre
> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS), lefayot, 2 mai 2001

Bonjour,

Oui, le passage incriminé est plus que sujet à discussion.
Et effectivement, le debat n’est pas pour ou contre les cookies (on s’en fout des cookies), mais plutot l’utilisation des données qui sont derrière à des fins marketing.
Le vrai probleme, c’est que personne n’est prevenu de cette utilisation.
Mais comme je l’ai dit, le probleme est endemique sur une bonne partie des sites marchands (ce qui n’est certes pas une excuse).
Ce qu’il faut rappeler, c’est que le flicage marketing n’a pas attendu l’internet. Il serait - par exemple- assez facile avec un dispositif ad hoc relié à une caisse de supermarché, de faire le rapprochement entre le ticket de caisse (donc les produits) et le client (à partir de la CB). Et donc de faire le ciblage marketing. C’est probablement déjà fait, d’ailleurs.
Le vrai problème est de savoir si le matraquage pub/maketing est subi ou désiré par le client. Un mix des deux, probablement. Mais s’il s’avere que le desir de consommer est fort, on ne peut pas non plus simplement prendre la posture contre les mechants capitalistes qui alienent le pauvre citoyen. Ce serait justement l’arbre qui masque la foret.
On peut aller jusqu’à se dire que la déresponsabilisation de l’individu est constitutive d’une société de masse (qu’elle soit démocratique ou non) ... Tout cela n’est guère réjouissant, je le concède, mais on ne peut pas non plus éluder ce genre de question.
Quoi qu’il en soit, la question justement est trop vaste pour etre traitée dans ce petit article.

Répondre
> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS), Embe, 3 mai 2001

Mais pourquoi le désir de consommer est-il fort ?
A quel point ce que l’on présente comme une légitimité (l’accès pour tous à la consommation) n’est-il pas induit dans la vaste stratégie des marketeurs ? Ne confondons-nous pas ici la consommation et la satisfaction des besoins essentiels ?
Je ne comprends pas ta réponse sur l’arbre et la fôrêt.
Mais je suis sensible aux arguments du messager non-identifié (2001-05-02 09:00:03) qui s’insurge de la légèreté de ton ton. Non, on ne peut pas s’en foutre ! Voilà des siècles et des siècles que nous reproduisons le même schéma d’exploitation de l’homme par l’homme (et la consommation est évidemment une exploitation très juteuse) mais nous n’avons pas avancé d’un millimètre.

La réponse se trouve à l’intérieur de soi-même avant tout. Alors pourquoi vouloir se substituer à notre jugement personnel, sinon pour maintenir cette féodalité bien confortable finallement. L’anarchie représente, pour moi, l’étape marquant le passage à un degré supérieur que l’homme n’a jamais eu la force d’atteindre, il s’agit bien d’une démarche communautaire, dénigrée pourtant par les marketeurs qui vendent du rêve et sème l’individualisme.
Embe

Répondre
> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS), Map, 10 mai 2001

Qui n’a pas été "anarchiste" ? Certainement pas moi, mais le mot a perdu de son sens. Proudhon, Bakounine, Kropotkine, Reclus : qui les a vraiment lu ? L’anarchisme est devenu un snobisme, comme les autres "isme" dont certains abusent pour masquer leur vide de pensée personnelle.

Dès que j’entends quelqu’un me dire : je suis social(iste), commun(iste), anarch(iste), anti/mondial(iste) , ça m’énerve. J’ai même tâté du journal(isme) et en suis repartie dégoûtée : l’idéal confronté à une certaine réalité aux dents longues. Aujourd’hui, je trouve sur l’internet une information plus libre et honnête (notamment grâce au minirezo).

Luttons personnellement, sans s’affilier aux "isme" !

Et ça ne m’empêche pas d’aimer Léo Ferré.

Répondre
> LES COOKIES (LEUR VIE, LEURS MOEURS), Embe, 14 mai 2001

Il me semble, si je peux me permetttre, que tu n’as jamais compris la véritable essence du concept. Je suis comme toi, réticent aux mots terminant en ’isme’, car je n’aime pas être catalogué et je me méfie des généralités.
Pour moi, l’anarchisme est une démarche avant tout personnelle basée sur le respect de l’autre. Cela ne veut en aucun cas dire, faire ce que l’on veut quand on veut, mais plutôt respecter des règles de vie communautaires.
C’est également supprimer toute idée de pouvoir d’état et de toute contrainte sur l’individu. C’est bien pour cela que je disais dans mon premier message que nous n’étions pas prêts. C’est à mon gout une démarche difficile, certainement impossible pour la majorité de nos concitoyens bien plus intéressés par leur nombril.
Tu as le droit de trouver cela snob, et je reconnais que l’on abuse souvent de ce genre d’idée pour masquer le vide de certains esprits. Pourtant c’est bien tout le contraire, commençons doucement et nous verrons bien où cela nous mène... Cela de devrait pas être pire que nos système actuels.

Répondre